Le talent d’un parfumeur ?
"Imaginer dans la tête l’odeur qu’il veut donner à son parfum. Avant de créer telle ou telle fragrance, un (bon) parfumeur sait déjà exactement ce qu’elle va sentir. Tout part du rêve ! Mes maitres à penser s’appellent Serge Lutens et Jean-Claude Ellena (…) Après une longue expérience dans la parfumerie indépendante, notamment chez Byredo, j’ai créé ‘Les Eaux Primordiales’ en 2015. C’est une Manufacture de parfums traditionnelle, visionnaire et familiale, qui a pour mission de sublimer le quotidien et réenchanter la vie. Je l’ai installée dans un domaine de 14 ha à Acq, près de Arras, avec un château qui appartenait à la Compagnie Charbonnière des Hauts-De-France. Son nom m’a été inspiré par ‘Vingt mille lieues sous les mers’ de Jules Vernes, les eaux primordiales étant les premières traces de vie sur Terre. Chacune des fragrances que je crée fait écho à mon grand intérêt pour la science. ‘Particules Imprévisibles’, ‘Moment Perpétuel’, ‘Mémoire du Futur’, ‘Mécanique Intuitive’, ‘Abstraction Raisonnée’… Pour faire mes parfums, j’utilise un savoir-faire manuel 100% made in France et un procédé unique : laisser le parfum en macération (en atmosphère contrôlée) pendant un an en cuve. Cela permet au parfum de laisser dans son sillage une odeur qui dure, gage de qualité. De la conception du jus jusqu'à la mise en flacon, la manufacture est le socle de toute la fabrication. J’ai envie de dire qu’ici, chaque étape de la naissance d'un parfum tient de la mécanique de haute précision."
Quid des parfums Les Eaux Primordiales ?
"Ils sont regroupés en trois collections : ‘Supercritique’ qui met à l’honneur les fleurs, le mimosa, la rose, le gardénia… ; ‘Superfluide’ qui met en avant les épices, les résines et les bois précieux ; et ‘Superclassique’. Laquelle incarne une certaine vision du parfum, à la fois moderne et intemporelle, inspirée par les grands classiques de la haute parfumerie française ; elle réinvente les formules pour leur donner un nouvel éclat empreint d'audace et d'innovation. Aujourd'hui, mon catalogue décline plus de 25 fragrances haut de gamme, distribuées d’une façon sélective dans 18 pays, dont la Belgique chez Senteurs D’Ailleurs."
Votre dernière création ?
"Cèdre Superfluide. Des effluves de rose et d’immortelle, un cœur aromatique de cèdre bleu de l’Atlas, des notes de fond veloutées de prune, de vanille et de safran. Un jus charismatique, racé, aussi puissant que sophistiqué. Le cèdre est une matière première difficile à travailler, mais son caractère apporte des notes fumées et camphrées qui donnent force et élégance à chaque parfum. ‘Superfluide’ car doté d'un fort pouvoir d'attraction. Créer un parfum comme celui-là, cela représente en gros deux ans de travail !"
Que répondez-vous à la sempiternelle question, à savoir si le naturel c’est mieux que les molécules synthétiques ?
"Je réponds que les molécules de synthèse dans la parfumerie, c’est comme l’électronique dans les voitures : une composante indispensable. Personnellement j’utilise toujours de belles matières naturelles, de la meilleure origine, auxquelles j’ajoute de la technique et de la modernité avec de la synthèse. Le mot « synthèse » n’est absolument pas un gros mot !"
Où puisez-vous votre inspiration ?
"Mon inspiration est principalement visuelle. Un tableau dans un musée. Une architecture. Un livre… Mais c’est surtout l’interprétation olfactive d’un rêve que j’ai fait. Une odeur fantasmée."
Un parfum mythique ?
"Jicky de Guerlain. Une légende. Son odeur est abstraite et signe la naissance de la haute parfumerie française. Il a vu le jour en 1889, autant vous dire que sa longévité est exemplaire. Si, lors de sa création, Jicky dérouta les femmes...ce fut pour être d’emblée adopté par les hommes. Cette mixité est à la fois visionnaire et très actuelle."